Le , le Boeing 737 Max 8 assurant le vol Ethiopian Airlines 302 d'Addis-Abeba à Nairobi, s'écrase six minutes après son décollage de l'aéroport de la capitale de l'Éthiopie. Les 157 occupants de l'appareil sont tués sur le coup, ce qui en fait l'accident le plus meurtrier de l'histoire d'Ethiopian Airlines[1] ainsi que le plus meurtrier survenu en Éthiopie[2].
Crash du vol Ethiopian Airlines 302 | |||
![]() Le Boeing ET-AVJ, l'appareil impliqué, décollant de l'aéroport international de Tel Aviv le . | |||
Caractéristiques de l'accident | |||
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Date | |||
Type | Impact au sol après perte de contrôle | ||
Causes | Défaut de conception des commandes de vol (MCAS) | ||
Site | Ejere, Éthiopie | ||
Coordonnées | 8° 52′ 37″ nord, 39° 15′ 04″ est | ||
Caractéristiques de l'appareil | |||
Type d'appareil | Boeing 737 Max 8 | ||
Compagnie | Ethiopian Airlines | ||
No d'identification | ET-AVJ | ||
Lieu d'origine | Aéroport d'Addis-Abeba Bole | ||
Lieu de destination | Aéroport international Jomo-Kenyatta | ||
Phase | Montée | ||
Passagers | 149 | ||
Équipage | 8 | ||
Morts | 157 | ||
Blessés | 0 | ||
Survivants | 0 | ||
Géolocalisation sur la carte : Éthiopie
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Il s'agit du second accident impliquant le Boeing 737 Max 8[3], entré en service en 2017 et dont trois cent cinquante exemplaires ont été livrés fin [4], le premier étant le crash du vol Lion Air 610 en également survenu peu après le décollage[5],[6]. La similarité de ces deux cas entraîne, dès le , la suspension de vol de tous les Boeing 737 Max.
Le vol régulier Ethiopian Airlines 302 entre l'aéroport d'Addis-Abeba Bole, en Éthiopie, et l'aéroport international Jomo-Kenyatta de Nairobi, au Kenya, transportait 149 passagers et 8 membres d'équipage, de 35 nationalités différentes[1],[7].
L'avion décolle le à 5 h 38 UTC (8 h 38 locales) en piste 07 (face au nord-est), par beau temps. Il ne prend que peu d'altitude (dans les trois premières minutes, pas plus de 500 pieds (350 m) au-dessus du niveau de l'aéroport, situé à 2 334 m au-dessus du niveau de la mer, avec une instabilité de vitesse verticale[8]), alors que la vitesse augmente au-delà de VMO (vitesse maximale autorisée) à près de 340 nœuds[9]. L'équipage signale un problème de commandes de vol et reçoit l'autorisation de faire demi-tour[10], mais finit par perdre le contrôle de l'avion qui s'écrase à Ejere à 5 h 44 UTC[1], cinquante-deux kilomètres à l'est-sud-est d'Addis-Abeba et non loin de la ville de Bishoftu[11].
L’appareil accidenté est un Boeing 737 Max 8, immatriculé ET-AVJ, c / n 62450, msn 7243[10]. Construit en , c'est le premier des quatre 737 Max commandés par Ethiopian Airlines, livré le [12]. Il totalisait 1 330 heures et 382 vols[9].
Le commandant de bord, Yared Getachew, 29 ans, sorti le de l'école de pilotes de ligne éthiopienne, totalisait 8 122 heures de vol dont 1 417 sur B737 et 103 sur B737 Max 8[9]. Il était devenu, en , le plus jeune commandant de bord de la compagnie[13].
Le copilote, Ahmed Nur Mohammod Nur, 25 ans, était récemment diplômé de l'école de pilotes de ligne de la compagnie et avait 361 heures de vol à son actif dont 207 sur B737 et 56 sur B737 Max 8[9].
L'accident fait 157 morts : 149 passagers et huit membres d'équipage. Leurs nationalités sont les suivantes :
Nationalité[14],[15],[16],[1] | Tués | Total | |
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Passagers | Équipage | ||
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32 | – | 32 |
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18 | – | 18 |
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9 | 8 | 17 |
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8 | – | 8 |
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8 | – | 8 |
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8 | – | 8 |
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7 | – | 7 |
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7 | – | 7 |
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6 | – | 6 |
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5 | – | 5 |
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4 | – | 4 |
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4 | – | 4 |
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3 | – | 3 |
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3 | – | 3 |
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3 | – | 3 |
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2 | – | 2 |
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2 | – | 2 |
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2 | – | 2 |
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2 | – | 2 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
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1 | – | 1 |
Total | 149 | 8 | 157 |
(L'une des victimes, Graziella de Luis Ponce[18], interprète free-lance pour l'ONU, avait une double nationalité, mexicaine et probablement italienne, car étant basée à Rome en tant qu'employée régulière de la FAO. Elle n'est comptée dans le tableau que sous son autre nationalité, qui n'a pas été confirmée).
La diversité des nationalités des passagers de ce vol entre deux capitales africaines s'explique par le développement d'Ethiopian Airlines qui a fait ces dernières années de l'aéroport d'Addis-Abeba Bole un hub entre l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique.
Plusieurs des passagers se rendaient à la conférence sur l’environnement prévue à Nairobi du 11 au [18]. Vingt-et-un membres de différentes agences des Nations unies ont péri dans l'accident[19]. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a adressé ses condoléances aux familles des salariés de l’organisation, ainsi qu'à celles des contractants, principalement des interprètes indépendants recrutés habituellement par l’ONU, qui se rendaient aussi à ladite conférence[18].
Parmi les victimes figurent Sebastiano Tusa (né en 1952), archéologue et homme politique italien, qui se rendait à Nairobi pour participer à un projet de l'Unesco, l'universitaire et écrivain nigéro-canadien Pius Adesanmi (en) (né en 1972), qui enseignait l'anglais à l'université Carleton à Ottawa[20],[21],[22] qui se rendait à une conférence de l'Union africaine[23] et Karim Saafi un Franco-Tunisien de 38 ans originaire de Marly-le-Roi en banlieue parisienne (ami d'enfance de l'humoriste français Yassine Belattar)[24] et bruxellois depuis plusieurs années, cofondateur du Forum de la jeunesse de la diaspora africaine en Europe (Adyfe) au titre duquel il intervenait à l’ONU.
Enfin, l'historien et homme politique slovaque Anton Hrnko (en) a perdu sa femme Blanka, son fils Martin et sa fille Michala[1],[25].
Deux personnes ont raté l’avion[26] :
Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a présenté ses plus sincères condoléances aux familles des victimes[7]. La nouvelle de l'accident a été communiquée quelques minutes seulement après le crash.
Le PDG d’Ethiopian Airlines, Tewolde Gebremariam, s’est rendu sur les lieux de l’accident, déplorant l’absence de survivants[27]. Il déclara durant la conférence de presse à Addis Abeba que « le pilote a mentionné qu'il avait des difficultés et qu'il voulait rentrer » et « il a eu l'autorisation » de faire demi-tour et de repartir vers Addis Abeba[14].
Boeing a également publié une déclaration de condoléances[28], étant « profondément attristée d'apprendre la disparition des passagers et de l'équipage du vol Ethiopian Airlines 302 »[14].
En raison des similitudes avec l'accident du vol Lion Air 610 du , également survenu sur un Boeing 737 Max et peu après le décollage, plusieurs nations ou compagnies aériennes décident la suspension de tout vol commercial des Boeing 737 Max sous leur autorité, dont la Chine le et l'Agence européenne de la sécurité aérienne le [29].
Après avoir demandé au constructeur de modifier d'ici le mois d'avril le système de commandes de vol MCAS, et initialement réaffirmé la sécurité de l'avion, la FAA prononce à son tour le la suspension des vols[30],[31]. Cette décision serait motivée par les données ADS-B reçues par satellite ainsi qu'à la découverte d'une pièce parmi les débris indiquant que l'avion était configuré pour piquer[32].
Jusqu'au crash du Lion Air, Boeing et la FAA avaient affirmé que le 737 Max ne présentait aucune différence de qualités de vol avec les précédentes versions, permettant aux compagnies aériennes d'éviter d'avoir à faire repasser aux pilotes de 737 une coûteuse qualification de type. Aucune mention du MCAS n'était faite dans la documentation destinée aux pilotes[33].
Depuis 2009, la FAA a délégué à Boeing (puis à plus de 80 autres sociétés) la responsabilité de certifier eux-mêmes la conformité de leurs produits aux normes de sécurité, ce qui selon un ancien responsable de la FAA, Michael J. Dreikorn, revient à « confier au renard le soin de garder le poulailler ». Selon le représentant démocrate Peter A. DeFazio, la FAA doit s'attendre à une commission d'enquête du Congrès sur le processus de certification de l'avion[33].
Le , le département des Transports des États-Unis lance un audit du processus qui a conduit à prononcer en la certification du Boeing 737 Max 8, pour s'assurer que les procédures nécessaires à la Federal Aviation Administration pour assurer la sécurité sont suffisantes[34].
Le Bureau de prévention et d’enquêtes sur les accidents dans l'aviation civile éthiopien est chargé d’enquêter sur l'accident, en association avec le Conseil national de la sécurité des transports (NTSB) des États-Unis, en raison de la nationalité du constructeur, Boeing[28].
Le lendemain de l'accident, les deux enregistreurs de vol sont récupérés[35]. L'Éthiopie ne disposant pas des moyens de dépouillement adéquats, les deux enregistreurs de vol (FDR et CVR) sont envoyées en France. Elles arrivent le au Bureau enquêtes et analyses (BEA) qui extrait avec succès les données avec la participation du Bureau d’enquêtes éthiopien sur les accidents et du NTSB[36],[37].
Les similitudes avec l'écrasement du vol Lion Air 610 font peser un doute sur le système informatique de stabilisation introduit sur les 737 Max, le MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System), censé éviter le décrochage mais qui, lorsqu'une sonde d'incidence donne une information erronée, peut agir à tort sur le stabilisateur horizontal et faire piquer l'avion[38]. De fait, le vérin qui commande ce stabilisateur aurait été retrouvé en position à piquer[32]. Le , après analyse des boites noires, la ministre éthiopienne des Transports confirme les similitudes entre les deux accidents[39].
D'après le rapport préliminaire du Bureau d’enquêtes accidents éthiopien, publié le , il y a effectivement eu les mêmes symptômes que lors du précédent crash : valeurs aberrantes de la sonde d'incidence pilote après le décollage, déclenchant le vibreur de manche et une alarme sur les indications de vitesse, puis à la rentrée des volets, le déclenchement du MCAS à piquer. Par deux fois, le MCAS s'active et oriente le stabilisateur à piquer quasiment en butée (0.4/5 unités)[9]. À la suite de cet événement, les pilotes ont réajusté la position du stabilisateur avec la commande de trim électrique sur le manche, puis ont bien désactivé le MCAS en coupant les interrupteurs de trim, conformément à la procédure qui avait été rappelée par Boeing et dont les pilotes avaient bien été informés. Lors du vol, cette coupure de trim permet d'éviter une nouvelle intervention du MCAS. Les pilotes tentent alors de contrôler le stabilisateur en manuel[9] (roue du trim) ; cependant, la vitesse de l'avion (340 nœuds) rend probablement impossible cette manœuvre[40] en raison de la pression trop importante exercée sur le stabilisateur avec cette vélocité. 3 minutes environ après sa coupure, le trim électrique est finalement réactivé dans des conditions inconnues, et le MCAS se réactive alors, faisant piquer l'avion à nouveau et conduisant à une situation incontrôlable pour l'équipage[9].
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